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Lorsque le chef s'adresse à ses hommes:
un exemple de représentation du pouvoir romain[*]

di JEAN-MICHEL DAVID (Strasbourg)



Sommaire



1. Introduction. Deux types de situations: hortatio (adhortatio) et contio

Le point de départ des réflexions qui vont suivre n'est pas à proprement parler littéraire. Il s'agit de cette représentation que l'on trouve assez fréquemment sur les monnaies à partir du règne de Néron ou encore sur les reliefs historiques de certains monuments impériaux et qui montrent un chef militaire, l'empereur, en l'occurrence, s'adressant à une troupe. La scène est parfaitement structurée: le chef est debout sur un tribunal, parfois accompagné d'un ou de quelques autres personnages, les hommes sont rangés à ses pieds, en tenue derrière leurs enseignes.

Ces images caractérisent bien évidemment le pouvoir impérial qui se manifeste là dans l'une de ses dimensions les plus essentielles: la relation entre l'imperator et ses hommes qui est tout à la fois garante de la victoire et source de charisme. Leur répétition laissant même supposer que la scène qu'elles construisaient étaient devenue nécessaire pour la définition collective de ce même pouvoir.

On peut alors passer de l'image plastique à l'image construite par la narration pour se demander si l'on y retrouve ou non des constantes comparables dans la représentation du détenteur de l'imperium qui permettraient d'en mieux comprendre la figure, examiner en d'autres termes, comment dans les reconstitutions historiques auxquelles procédaient les auteurs anciens une telle relation se trouvait mise en scène et s'interroger sur les traits récurrents qui signifiaient à travers elles la capacité d'un homme à conduire ses troupes à la victoire. Afin de rester pourtant dans des limites raisonnables, je me contenterai de relever et d'examiner les situations de ce genre qui apparaissent dans César, Tite- Live et Salluste. De l'un à l'autre en effet des différences apparaissent qui permettent de mieux cerner les procédés de la mise en scène du pouvoir et de l'organisation de son exemplarité.

Deux types de situations méritent toutefois d'être distinguées. La première, que l'on nomme hortatio ou adhortatio, trouve sa place sur le champ de bataille: le chef s'adresse à ses hommes à l'instant du combat. La troupe est rangée ou encore en marche. L'ennemi est en vue ou attaque déjà. Dans tous les cas, c'est l'urgence qui commande. Le chef n'a qu'un but: stimuler l'ardeur des soldats. La seconde en revanche se situe dans des circonstances plus calmes, en ville ou au camp lorsque la menace n'est pas encore présente ou s'est éloignée. Les discours peuvent alors se faire plus longs et plus explicatifs: on la désigne sous le nom de contio.

2. César

Dans les commentaires de César, la hortatio apparaît fréquemment: une quinzaine de cas dans le Bellum gallicum[1], et à peine plus dans le reste du corpus[2]. Ne retenons que quelques exemples en essayant d'en tirer les principales caractéristiques.

A l'instant de la bataille de la Sambre, César fut surpris par l'ennemi: Caesari omnia uno tempore erant agenda: vexillum proponendum, signum tuba dandum (...), acies instruenda, milites cohortandi, (...). Caesar necessariis rebus imperatis et ad cohortandos milites quam in partem fors obtulit decurrit et ad legionem decima devenit. Milites non longiore oratione cohortatus quam... (...). Atque in alteram partem item cohortandi causa profectus pugnantibus occurrit[3]. Malgré l'urgence, ou peut-être précisément à cause d'elle, la cohortatio apparaît comme un comportement nécessaire au même titre que l'organisation de la ligne de bataille et les ordres au combat. Et ce n'est que parce que ses hommes étaient déjà aux prises avec l'ennemi que César renonça à les haranguer.

Elle révèle ainsi ce qui distingue les bons et les mauvais chefs. Dans l'embuscade montée en 54 par les Eburons, alors que Titurius Sabinus perdait son sang froid, Aurelius Cotta qui cogitasset haec posse in itinere accidere (...) nulla in re communi saluti deerat et in appellandis cohortandisque militibus imperatoris et in pugna militis officia praestabat[4].

Aussi est-elle le plus souvent suivie de la victoire. Mais c'est surtout parce qu'elle est le fait d'un chef compétent et efficace, de César tout particulièrement, qui l'emporte sur ses adversaires. Quelques autres exemples apparaissent en effet, conformes à la dure réalité de la guerre, où César lui-même, ou d'autres tout aussi capables que lui, furent battus après avoir correctement harangué leurs troupes. Le contenu de ces discours surtout n'a pas une importance telle de devoir influencer le destin. Les propos sont très rarement rapportés et quand c'est le cas, restent extrêmement brefs et le plus souvent au discours indirect. La topique, quand elle apparaît, est banale et passe généralement par des appels au courage et des promesses de victoire et de butin[5]. Seul compte en quelque sorte le fait de les avoir prononcés, comme s'ils justifiaient plus par leur présence que par leur contenu, voire leur efficacité, la qualité d'un chef.

Si l'on passe aux contiones, la situation se présente de façon légèrement différente. Il faut se souvenir en effet que selon Festus, le terme ne s'appliquait qu'aux assemblées convoquées par un magistrat ou un prêtre par l'intermédiaire d'un praeco[6] et signifiait donc une assemblée de citoyens. L'armée retrouvant ici sa définition civique. Les exemples sont rares, de moitié moins nombreux que les hortationes[7]. Et sans doute aussi n'ont-ils pas la même fonction.

Conformément à cette définition première de la contio, ils sont pour le chef l'occasion d'expliquer à ses hommes quelle est leur situation et de leur faire part de la tactique qu'il a décidé d'adopter. Mais par un glissement qui correspond finalement assez bien à la nature des Commentaires, les discours qui y sont tenus permettent souvent de justifier des comportements contestables ou contestés: le passage du Rubicon par exemple[8] ou l'incorporation sous les ordres de Scribonius Curio des soldats qui avaient prêté serment à Domitius Ahenobarbus[9]. Du même coup, les énoncés sont généralement plus longs et plus souvent au style direct. Le contenu en est plus divers aussi car adapté à la situation spécifique qu'il est destiné à éclairer. Mais il n'est pas révélateur non plus du rapport du chef à ses hommes. Les réactions de ces derniers ne sont pas évoquées. En quelques occasions seulement, ils apparaissent comme particulièrement motivés par les propos de leur général ou crient un accord qu'on supposerait pourtant dans tous les cas obligatoire[10].

Si bien que, de façon un peu décevante, les harangues militaires qui apparaissent dans les Commentaires de César, ne sont pas véritablement l'occasion d'une mise en scène du pouvoir du chef. Les hortationes sont certes largement présentes et définies comme nécessaires, mais l'évocation en est souvent rapide. César ou ses continuateurs ne profitent pas de ces moments de la narration pour construire une belle figure de général mobilisant ses hommes par la puissance de sa parole. Certaines contiones marquent davantage le récit. Mais dans ce cas, leur fonction est plus alors de justifier une politique que de manifester un rôle par l'évocation d'une image. Comme si dans le genre littéraire qu'avait adopté César, le discours à la troupe était tellement naturel qu'il ne méritait pas d'être souligné en tant que tel.

3. Salluste

Les indications données par Salluste sont trop peu nombreuses pour que l'on puisse aller bien loin dans l'analyse: deux cas seulement de contiones[11] et six de hortationes[12]. On remarquera simplement que seules la hortatio de Jugurtha à la bataille du Muthul[13] et la contio de Catilina à la veille de celle de Pistoia[14] sont véritablement l'occasion de tracer le portrait d'un chef et que dans les autres cas l'auteur se contente d'indications rapides et banales qui n'interrompent pas la narration et qui peuvent aussi bien être suivies d'échecs que de succès. Si bien que si une impression devait se dégager de ces quelques cas, elle serait très proche de ce que la lecture des Commentaires de César avait permis de souligner.

4. Tite-Live

Le corpus des scènes fourni par Tite-Live est en revanche beaucoup plus instructif. Plus abondant d'abord, mais surtout sensiblement plus marqué par le souci de mettre en scène l'exercice du pouvoir militaire.

La distinction entre la hortatio et la contio demeure encore quoique quelques cas limites laissent supposer qu'elle n'est pas essentielle[15]. En fait, sous ses différentes formes, c'est la harangue qui est nécessaire à la définition du chef. Un exemple permet de le souligner. En 176, le consul Q. Petilius qui combattait les Ligures, fut vaincu. Un omen permettait d'expliquer ce revers: Ibi adhortantem eum pro contione milites, immemorem ambiguitatis verbi, ominatum ferunt se eo die Letum capturum esse[16]; révélant au passage qu'il était indispensable qu'il se fût adressé à ses hommes. Si bien que les situations les plus critiques[17] comme toutes les veilles de grandes batailles fournissent l'occasion de belles reconstitutions de discours militaires.

C'est sans doute ce qui explique que les contiones soient représentées dans une proportion plus grande chez Tite-Live qu'elles ne l'étaient chez César. Elles constituent en effet la moitié des cas environ au lieu d'un tiers pour ce dernier auteur. Elles autorisent en effet des discours plus longs, plus ornés, qui témoignent davantage de l'art oratoire de l'écrivain. Elles font apparaître une topique qui évoque le plus souvent le rôle du chef, sa légitimité et sa compétence, la faiblesse de l'ennemi et la valeur des soldats, la tactique qui va être employée et les récompenses qui suivront la victoire[18]. Rien de bien original certes puisque tout ceci appartient au genre de la suasoire si souvent employé par les historiens antiques, mais qui définit assez bien le rôle du chef militaire.

Ce n'est pourtant pas dans le contenu des énoncés qu'il faut tenter de percevoir la façon dont Tite-Live caractérise le mieux la relation qui associait le chef et ses hommes mais bien plutôt dans les conditions et les formes de l'énonciation. Deux traits doivent en effet retenir l'attention.

Le premier — pour reprendre les définitions de Roman Jakobson — correspond à la dimension pathétique de la situation de communication et révèle l'effet que ces discours devaient normalement produire sur leurs auditeurs. Dans tous les cas en effet les hommes approuvaient leur chef en l'acclamant par des cris (clamor) ou enflammés par ses propos (accensi) manifestaient par leur énergie à quel point la harangue qu'ils avaient entendue avait été efficace[19]. Le seul cas contraire de soldats abattus et silencieux correspond en effet, et ce cas est à lui seul une confirmation éclatante de cette première règle, au discours que tint Scipion l'Africain quand il réprima la mutinerie de Sucro[20].

Plus significatif encore de l'efficacité du discours du général est le fait que presque toutes les exhortations soient suivies de succès. Dans tous les cas en effet, la troupe ainsi stimulée emporte la victoire ou au moins évite la déroute. Les seules exceptions sont soit la contio de Q. Petilius que l'on a déjà évoquée mais qui n'a sa place dans le récit que parce que l'omen dont elle fut l'occasion, explique l'échec, soit les situations de veille de grandes batailles, le Tessin, Zama ou Cynoscephales par exemple[21], où Tite-Live suivant souvent en cela les sources dont il disposait, reconstituait les harangues des deux protagonistes et qu'il fallait bien dans ce cas que l'une des deux fût suivie d'une défaite.

C'est donc dans cette relation quasiment obligatoire entre le discours du chef et la vigueur de ses hommes, entre son énergie et sa compétence oratoire d'une part et leur capacité à vaincre l'ennemi de l'autre que l'on saisit l'un des traits essentiels de l'image de l'imperator dont la puissance de parole génère et garantit la victoire.

D'ailleurs l'évocation de la personne même du général s'adressant à ses hommes, précise et confirme, mais dans la dimension éthique de l'énonciation cette fois, cette spécificité du comportement qui désigne le vrai chef.

En tant qu'orateur, c'est la brevitas qui lui convient: simpliciora militaris decent, notait Quintilien[22]. Il ne faut donc pas s'étonner que Tite-Live souligne à plusieurs reprises le caractère limité et volontairement réservé des propos tenus: M.' Acilius Glabrio en 191 aux Thermopyles, paucis est adlocutus[23] ou encore Cn. Manlius Vulso en 189 à la veille de la campagne contre les Galates de se quoque pauca nec falsa nec immodica adiecit[24]. Car il fallait aussi, semble-t-il qu'il parlât de lui-même, soit qu'il expliquât sa tactique[25], justifiât sa conduite[26] et surtout définît sa propre légitimité, comme par exemple Scipion l'Africain quand il prit le commandement de l'armée d'Espagne en 210: nemo ante me novus imperator militibus suis, priusquam opera eorum usus esset, gratias agere iure ac merito potuit; me vobis priusquam provinciam aut castra viderem, obligavit fortuna, primum quod ea pietate erga patrem patruumque meum vivos mortuosque fuistis, deinde quod amissam tanta clade provinciae possessionem integram et populo romano et successori mihi virtute vestra obtinuistis[27].

De tels propos mettaient bien évidemment en place la relation qui associait le chef à ses hommes. Toutes les harangues n'étaient certes pas aussi explicites. Mais le caractère récurrent des justifications dans la topique du discours militaire allaient dans le même sens. Elles contribuaient à définir l'orateur comme le chef nécessaire et reconnu de son auditoire puisqu'aussi bien elles étaient approuvées par les clameurs et l'énergie des soldats, et sanctionnées par le succès qui ne manquait pas de suivre.

Une image se dégageait donc qui prenait parfois des tonalités plastiques: Celsus haec corpore vultuque ita laeto, ut vicisse iam crederes disait Tite-Live de Scipion à la veille de Zama[28]; et qui permettait une figuration visuelle de la harangue. Si bien que c'est par là que l'on retrouve aussi la trace des représentations que portaient les monnaies et les reliefs d'époque impériale.

5. Conclusion

De César à Tite-Live, les contrastes demeurent donc, comme si l'un s'était contenté de faire allusion à la situation d'échange oratoire quand l'autre l'a mise en scène. Entre les deux la différence est forte. Le premier ne représente généralement pas: il emmène son lecteur avec lui et lui fait partager sa victoire, comptant sur l'effet de connivence pour obtenir l'attachement. Le second au contraire dresse des tableaux, soulignant par le jeu des récurrences la nécessité des comportements, bâtissant en quelque sorte par des images fortes les schèmes de l'exemplarité. La différence entre les deux est certes liée à leurs choix narratifs car il y a loin du commentaire de l'un à la reconstitution historique de l'autre. Mais le cas de Salluste incite à réfléchir puisque tout en écrivant une véritable Histoire, il ne semble pas donner davantage d'importance à la harangue militaire que ne le fait César. Ne serait-ce pas alors que, de la fin de la République au tout début du Principat, le besoin de mettre en scène cette relation entre le chef et sa troupe qui garantissait le salut et l'extension de l'Empire, se serait fait bien davantage sentir, annonçant ainsi les traits qui dans l'iconographie impériale révéleront la promesse de victoire dans l'image de l'empereur s'adressant à ses hommes?

[*] Cet article est une version légèrement allégée d'une communication sur le point d'être publié dans Paroles romaines, table ronde, Nancy, oct. 1991. On pourra s'y reporter notamment pour la bibliographie moderne.

[1]I, 25; II, 20-21; III, 19; 24; 26; V, 33; 35; VI, 8; VII, 24; 40; 62; 68; 86; VIII, 28.

[2]B.C., I, 45; II, 28; 39; 41; III, 41; 46; 89-90; 95; 97; B. Alex., 16; 20; 21; 22; B. Afr., 16; 58; 63; 81.

[3]BG., II, 20-21.

[4]B.G., V, 33; cf. B.C., II, 41.

[5]Les exemples les plus développés sont B.C., II, 39; III, 89-90 (avant Pharsale); B. Alex., 16; B. Afr., 81; et il n'est pas indifférent qu'ils appartiennent au Bellum civile et aux textes non césariens du corpus.

[6]p. 34 L.

[7]B.G., V, 48; 52; VI, 3; VII, 52; B.C., I, 7; II, 32; III, 6; 73; 82; 85; B. Alex., 57; B. Afr., 54; 86; en ajoutant B.G., VII, 19; B. Alex., 8.

[8]B.C., I, 7.

[9]B.C., II, 32.

[10]B.C., I, 7; II, 32; III, 6; III, 73. Ces quelques cas correspondent d'ailleurs aux événements les plus importants.

[11]B.J., 54; Cat., 57-58.

[12]B.J., 49; 51; 68; 94; 107; Cat., 59.

[13]B.J., 49.

[14]Cat., 57-58.

[15]Cf. XL, 27, 8.

[16]XLI, 18, 10.

[17]E.g. IX, 31, 10.

[18]Cf. e.g., (en se limitant à la première décade) III, 61; 62; VI, 7; 12, 8 sqq.; VII, 32, 12 sqq.; IX, 23, 9 sqq.; 31, 10-13; X, 17, 5 sqq.; 39, 11 sqq.

[19]Cf. en ne reprenant que quelques exemples parmi les plus significatifs, III, 62, 4-5; VI, 8, 2; VII, 16, 5; X, 19, 11-12; 40, 1; XXIV, 16, 1; XL, 27, 14; XLII, 53, 1.

[20]XXVIII, 29, 1: adeo torpentibus metu qui aderant ut non modo ferocior vox adversus atrocitatem poenae sed ne gemitus quidem exaudiretur.

[21]XXI, 39-41; XXIII, 45 (défaite d'Hannibal devant Marcellus); XXX, 32, 6; XXXIII, 3-4.

[22]XI, 1, 33.

[23]XXXVI, 17, 2.

[24]XXXVIII, 12, 4.

[25]Cf. e.g. VI, 12, 8-10; IX, 23, 9-13; XXIV, 38, 6-7; XLII, 61, 7-8.

[26]Cf. e.g.VI, 7, 5; VII, 32, 15-17; XXVII, 45, 3.

[27]XXVI, 41, 3-5; cf. X, 39, 14; XXI, 43, 15; XXVIII, 32, 6-7; XXIX, 24, 5-7; XXXIII, 3, 12.

[28]XXX, 32, 11.


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Last technical revision August, 31, 1995.

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